Mes photos du Maroc revisitées.

Vous passez un temps ailleurs? Pour valoriser votre séjour, vous prenez des photos. Il y a là tout un ensemble de motifs: en garder le souvenir, en apprécier ex post des aspects que l'on ne voit pas sur-le-champ, montrer vos exploits à votre public à vous, etc. Ce sont là des motifs où la photo fonctionne comme un moyen en vue d'une fin en dehors d'elle. Mais la photo peut constituer une fin en soi, par exemple quand je me rends à tel endroit pour faire de belles photos, ou des photos intéressantes sous tel et tel point de vue. Là, on pourra distinguer la forme du contenu: Est-ce plutôt la qualité de la photo elle-même qui m'intéresse - ou l'intérêt qu'offrent la scène ou l'objet photographiés? 

Mais peut-on distinguer ces aspects-là? Pas toujours. Prenez l'exemple de la lumière, médium par excellence de la photographie, cette "écriture de lumière". Elle semble "coller" tellement à la photo que je n'arrive pas à en faire un objet... Il m'arrive cependant de photographier la lumière. Alors? On dira que ma photo "thématise" son médium. Or, n'est-ce pas là seulement une façon de parler pour éviter le problème? Quel problème? Celui du médium qui passe au statut d'objet... ou vice-versa, l'objet s'imposant comme médium, risque de perte de distance qui pourrait quand-même nous inquiéter, n'est-ce pas? 

Ainsi, quand je regarde mes photos, je ne suis pas toujours sûr si je vois un objet ou le médium même de sa propre vision. Ce flottement, n'en émane-t-il pas un charme que nous cherchons? Car c'est alors comme si l'objet se donnait à voir lui-même, révélation qui fait oublier le moyen technique de sa présentation. Je pense que ce sont ces photos-là qui m'attirent le plus dans mon album du séjour au Maroc, pays où les êtres et les objets, les scènes enfin, "se donnent à voir". 

Illusion référentielle ou vérité du phénomène? C'est l'appel du phénomène qui, chez moi, déclenche la photo, dans le meilleur des cas. Alors, la meilleure des photos, c'est celle qui réitère cet appel, n'est-ce pas? 

Au départ, donc, il y a la communication entre le photographe et la scène ou l'objet photographiés, communication où les limites qui séparent la scène et l'objet, le médium et le référent, le photographe et la scène sont plutôt floues, où elles "circulent", si vous voulez. Le moment du "clic" déclencheur est celui, alors, où le photographe trahit ce rêve, où il s'en sépare en le cantonnant dans son cadre, ce Viereck magique.

Voici ce billet lu par l'auteur:

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